En perspective du Congrès socialiste, Marseille sans repère

Samedi 20 octobre 2012


Qu'un  policier  puisse  déclarer  au correspondant  de  Libération « On évolue dans une ville où la corruption est partout, où leclientélisme et la magouille tiennent lieu de mode de fonctionnement » est ici vécu comme une évidence. Qu'un collectif réunissant syndicalistes, élus et associatifs partage dans une tribune de Libération le diagnostic de l'état de « délabrement de l’ordre républicain dont les fondements sont pourtant censésgarantir une démocratie active au service de l’intérêt général » entraîne des sourires entendus à Paris.

Contre l'évidence, la tentation est toujours de faire mine de croire, qu'à Marseille et dans le département, tout se passe normalement. Pourtant si la police bout, les pompiers suffoquent, les associations doutent, la politique s'étiole. Au parti socialiste, en perspective du Congrès, rien ne laisse apparaître une volonté quelconque d'y remédier. Mais ce qui a longtemps été une facilité, s'avère aujourd'hui une faute.

Les législatives ont permis à de nombreux députés socialistes d'être élus lors de triangulaires, même si nombre d'entre eux constituent la garde rapprochée du président du Conseil général des Bouches du Rhône, toujours adhérent du parti socialiste, toujours grand maître d'oeuvre de la fédération socialiste.

Les visites ministérielles sont autant d'occasions pour le président du Conseil général d'être reçu, comme de recevoir. Elles sont brandies ici comme des adoubements.  «Et  ceux qui viennent contester sont des aigris qui n'ont aucune reconnaissance, même pas celle du ventre». Derrière ce langage imagé, le « je les ai tous faits » livré sans vergogne à la presse, se veut menaçant contre toute velléité d'émancipation.

Rien n'a changé

Ici rien n'a changé. Il devient de plus en plus difficile d'affirmer que l'on ne savait pas. A l'exact l'opposé de l'idéal socialiste, la machine à produire les allégeances s'est remise en route à plein régime.

A Paris, va-t-on laisser faire comme si de rien n'était ? Chacun sait que le fonctionnement actuel de la fédération est le fruit d'un système clientéliste dont la contrepartie inique est celle de la caporalisation des militants, de la distribution des prébendes et des atteintes répétées à l'intérêt général. Si rien ne changeait, outre le signal ravageur adressé à l'ensemble de la société, la question serait alors de savoir comment les corrupteurs et les corrompus se partagent les rôles.

Formulée par Harlem Désir, alors premier secrétaire intérimaire, le 8 septembre 2011, au soir de la mise en examen du président du Conseil général des Bouches du Rhône pour prise illégale d'intérêt, trafic d'influence et association de malfaiteurs, sa mise à l'écart n'a été suivie d'aucun effet.

Fermeté contre le système clientéliste

Il est vrai que les objections des tenants du statuquo sont multiples, même si pas forcément dicibles. Pourtant la jurisprudence Kucheida, du nom de l'ancien patron de la fédération socialiste du Pas-de-Calais éliminé au soir du premier tour des législatives est formelle : la fermeté contre un système clientéliste peut se faire sans douleur, du jour au lendemain, dès lors que le parti socialiste siffle la fin de l'inacceptable. Réclamée par les électeurs, la fermeté offre la  cohérence entre les paroles et les actes, si chère à Jean-Marc Ayrault.

Quand le Premier ministre exige l’exemplarité la plus totale des fonctionnaires qui travaillent au nom de l’Etat, il est temps que le même, chef de la majorité exige la même exemplarité partout ailleurs dans les Bouches du Rhône. C'est même la condition de réussite de sa volonté de redonner espoir à l'agglomération marseillaise et ses habitants.

Ici un engagement réitéré du nouveau premier secrétaire de plein exercice au retour de l'ordre républicain, jusque dans ses propres rangs, serait salué par tous et porteur de changement, bien au-delà du seul Parti socialiste, vers l'ensemble de la société.

Tels sont les voeux des très nombreux citoyens qui n'acceptent plus que, nous socialistes, soyons si empruntés, en mal de repères, et continuions, au sein de notre propre parti, à ne rien faire qui soit à la mesure des enjeux.

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Le texte fondateur du 27 mars 2011

La situation actuelle nous impose d’agir



La réalité est cruelle. Les résultats des élections cantonales sont catastrophiques. Notre Parti est déphasé par rapport au reste du pays. Nous perdons des sièges, alors que nous devrions en gagner. Et, pire encore, nous perdons notre âme en laissant un espace politique béant devant la droite et le Front national.



Tous les jours nous découvrons par la Presse qu’un système a été mis en place et que notre territoire cumule :


* des pratiques népotiques ; quand il y a confusion des intérêts privés avec ceux de la collectivité ;


* des pratiques corruptives ; qui caractérisent l’utilisation abusive de biens publics ;


* des pratiques claniques ; quand les soutiens sont régulièrement accordés à certains réseaux d’influence ;


* des pratiques autoritaires ; quand les arbitrages sont rendus sur des intérêts autres que ceux guidés par l’intérêt général ;


* des pratiques clientélistes ; quand les pratiques visent à se constituer des obligés par distorsion de la nécessaire proximité.




Cette rupture du principe d’égalité entre les citoyens tellement loin du "socialisme des comportements" que Léon Blum appelait comme une exigence, constitue un facteur puissant de rejet de nos concitoyens, tout particulièrement les plus défavorisés. Cette crise de valeurs nous rend incapables d’être attractifs pour les batailles futures aussi bien dans le département, que pour la ville de Marseille. Nos idées et nos valeurs socialistes sont confisquées et instrumentalisées.


Pour nous militants socialistes des Bouches du Rhône, toutes ces pratiques déviantes doivent être proscrites et des enseignements de la situation présente, tirés sans mesure dilatoire. Continuer à agir comme si de rien n’était, est une faute politique majeure, que nos concitoyens ne manqueront pas de nous reprocher.



Aussi, nous demandons de façon immédiate :


* de faire appliquer les statuts de notre Parti. Article 16.1 (Les fonctions de Président(e) de Conseil général sont incompatibles avec celles de Premier Secrétaire fédéral.) ; de ce fait, annuler l’élection du dernier trimestre 2010, en se laissant le temps d’organiser une nouvelle élection ;


* avant le rétablissement d’un fonctionnement démocratique exemplaire, suspendre tout vote organisé par notre fédération dont celui convoqué le 29 mars 2011 ; de ce fait, procéder à la désignation de notre candidat à la Présidence du Conseil général telle que prévue par le Code général des collectivités territoriales en proscrivant toute procuration et en accord avec nos partenaires politiques naturels au bénéfice d’un candidat dont le mandat aura été renouvelé lors des scrutins des 20 et 27 mars ;


*rendre impossible à titre provisoire, la tenue d’une responsabilité fédérale (à partir de secrétaire de section) avec celui de salarié d’une collectivité dont nous assurons l’exécutif ; prendre la responsabilité de l’établissement de la liste des adhérents de la fédération ; suspendre le rôle de la fédération dans le processus de désignation des candidats aux prochaines élections.



Etre militant politique, élu ou non, n’est pas un coupe file pour passer devant nos concitoyens que l’on prétend servir. Par une action résolue, notre Parti saura faire preuve de lucidité et porteur d’une nouvelle exemplarité, sans rester les bras croisés face aux évènements.


Notre tâche ne fait que commencer, nous voulons le renouveau du Parti socialiste dans les Bouches du Rhône, il est donc fondamental de se donner des règles qui seront constitutives de la reconstruction de notre fédération.


Nous voulons libérer le Parti et d’abord nous libérer nous-même des habitudes et des formes de dépendances à l’égard de groupes de pressions ou d’élus qui ont bâti autour d’eux, à des fins d’investitures, de véritables « machines » qui n’ont plus rien à voir avec le Parti dans lequel nous sommes librement engagés.



A chaque adhérent(e) libre de notre fédération socialiste de rejoindre le mouvement, d’ouvrir le débat dans sa section, de faire connaître sa volonté de mettre fin aux pratiques déviantes, de faire des propositions dans le respect mutuel pour que la peur change de camp et le renouveau trouve une réalité, au-delà des maux.



Version téléchargeable.


Nos propositions pour sortir de l'impasse